dimanche 5 février 2006

Holly fuckin' Pez !



Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours connu devant les caisses des grandes surfaces les jouets Pez. Certains les appellent distributeurs, les puristes utilisent le terme plus adéquate de « briquet Pez ».

Commercialisé en France depuis un bon 25 ans au moins… A l’époque, ils trônaient en haut des étagères, des dizaines de modèles différents s’étalaient. Désormais, il ne reste plus qu’un modèle ou deux à peine, perdu tout en bas, au fond, à l’abri des regards.

Je ne m’attarderais pas sur cette déchéance Pezienne. Comme lorsqu’un proche nous quitte, on se félicite de l’avoir connu, je me féliciterais donc que les Pez soient encore en vente libre.

Car en 25 ans, personne ne me fera croire qu’ils n’ont reçus aucune lettre de réclamation, aucune plainte sur ce stupide système de recharge ? Aucune langue coincée (hormis la mienne mais j’ai tendance à la laisser traîner un peu partout ces temps-ci), pas un seul petit accident que la Morale réprouve avec l’un de ces briquet Pez ?(enfonce le moi jusqu’à la garde mon gros cochon !)

Le modèle le plus classique, celui autour duquel s’est construit le mythe, je veux parler bien entendu du modèle Titi à corps bleu. Alors j’entends ici et là « ouais mais le modèle Dark Vador ? » Le Dark Vador, c’est de la roupie de sansonnet face au modèle Titi, ok ? De la gnognotte, du pipi de chat, de la crotte, je me suis bien fait compris ?

Certes, en 25 ans, quelques améliorations, mais purement esthétiques ! La base, le réceptacle à bonbec si vous préférez, est resté en tout point identique.

Pas de méprises, je ne leur reproche pas cette perpétuation.

Lorsqu’on crée (volontairement ou non, je ne me suis pas encore totalement penché sur la question hélas) un tel outil, d’une perfection sans égal, on ne peut que se prosterner et applaudir à tout rompre. Ce réceptacle est le fondement même du briquet Pez. Son Essence, son Ame.

La partie supérieure, elle, évolue avec les mœurs, avec son époque, et c’est tout légitime. Même si je persiste à croire que la plupart ne sont que de vulgaires ersatz cinématographiques et commerciaux d’un opportunisme exacerbé qui me révulse littéralement. Citons par exemple les modèles E.T, Simpson, Bob l’Eponge, Snoopy et tutti quanti.

Hormis ces détails, je défie à quiconque de me discerner un briquet Pez fabriqué il y a vingt ans d’un modèle plus contemporain (je pense notamment au modèle Obélix).

Attardons nous un instant sur le bien fondé du Pez. Le Pez est philosophique. Le Pez est religion.

Le briquet Pez n’est pas un jouet. C’est un distributeur ! (il se sert un grand verre d’eau puis le bois d’un seul trait).

J’insiste sur cette notion car elle est importante : UN DISTRIBUTEUR.

A-t-on déjà offert un distributeur à un enfant pour qu’il s’amuse ? Avez-vous seulement déjà vu un enfant jouer et rire grâce à un distributeur ? Grands Dieux non, jamais.

Car en offrant un briquet Pez, on socialise l’enfant, on le rend mature.

« Tiens jeune enfant, voici un présent. Il s’agit d’un briquet Pez, fais-en bon usage en distribuant à ton gré » (vous aurez noté qu’il est de bon ton de stipuler la fonction première de pareil objet à l’enfant même si, malgré ses nombreuses tares, il en aura vite deviné le meilleur usage).

Connaissez-vous meilleur outil de socialisation qu’un distributeur Pez ? Autour d’un tel objet, des relations se nouent, des couples se forment (« c’est grâce à un briquet Schroumpf que j’ai rencontré mon troisième mari » m’a témoigné récemment une fidèle lectrice).

Alors bon : Où et quand sortir son briquet Pez ?

Notez bien ceci : Toutes les occasions sont bonnes pour sortir son briquet Pez. Ne jamais se cacher pour se sustenter. C’est bien compris ? De la dissimulation naît la honte.

De mémoire, je ne me souviens pas avoir déjà été honteux d’arborer en toutes circonstances un briquet Pez à même la poche de ma chemise. La tête dépassant, telle une offrande, j’invite quiconque à venir me réclamer un Pez ou deux. C’est avec une joie sans pareille que je les servirais.

Lors d’une barmitzva ou de l’Aid el Kebir, au cours d’un vernissage ou d’un cocktail mondain, une partie fine ou l’enterrement d’un proche…Une cérémonie officielle, ou la remise des palmes académiques, Mérite Agricole ou Légion d’Honneur…

N’hésitez pas à brandir votre briquet Pez que diable et distribuez allégrement autour de vous moult bonbons. A noter toutefois que les briquets Pez sont proscrits les jours de Shabbat pour des raisons évidentes.

Je me plais parfois à rêver d’une personne (c’est un appel que je lance là) capable de discerner sans sourciller les différentes saveurs des Pezs.

Une personne susceptible de me dire, quelles que soient les circonstances :

« Ca tu vois mon petit bonhomme, c’est un Pez à la Cerise » ou bien encore

-« Un Pez à la pomme dissimulé dans les citrons, chercherais-tu à me duper ?»

C’est mon petit côté utopiste ça, voyez…

Des thèses révisionnistes tendraient à prétendre que : « Dragibus = plusieurs couleurs pour un seul et même goût » mais je ne me ferais pas le porte-parole de telles théories nauséabondes).

La phase cruciale, la plus complexe est celle dite de la recharge. Le secret réside avant tout dans l’ouverture du paquet de bonbons. Processus malheureusement souvent bâclé par des mains trop pressées.

Peziquement parlant, et en toute modestie, je suis le Dieu de la recharge. Quelques conseils pour bien faire :

Prenez votre temps, pas d’appréhension, ne paniquez pas, respirez calmement et contrôlez pleinement vos gestes. Les tremblements, l’anxiété ou une transpiration excessive pourraient avoir une influence désastreuse sur une recharge de briquet Pez.

Ouvrez le paquet dans le sens de la longueur, dégagez bien les bords. Ouvrez au maximum votre briquet Pez (amplitude conseillée: 72°). Puis retournez rapidement votre recharge dans le réceptacle. Plus le geste est rapide et précis, mieux la recharge s’effectuera. Il est possible que lors de vos premières tentatives, les bonbons situés aux extrémités se désaxent et « poudrillent » (jargon Pezique). Je vous invite à recommencer au plus vite, de ne pas rester ainsi décontenancé face à l’échec. Moi-même, il m’arrive encore de « poudriller » sans honte. Je l’avoue ouvertement face à vous : pas plus tard qu’hier, j’ai poudrillé. C’est même devenu un sujet à boutades dans mon entourage : « regardez Michel, il a encore poudrillé ! »

Ce qu’ils manquent aux Pez, ce sont des bras. Indubitablement. Si les Pez avaient des bras, nul doute qu’à l’heure qu’il est, ils domineraient le Monde.

N’oubliez jamais qu’une trachéotomie paraîtra toujours plus douce et joyeuse à l’aide d’un briquet Pez.

J’ai volontairement occulté la portée mystique, quasi-biblique d’un briquet Pez. Car je n’ignore pas qu’il s’agit là d’un sujet délicat, touchant tour à tour à la métaphysique, qu’à la thaumaturgie et aux prémices même de toutes les religions (cultures animistes comprises).

Est-ce un hasard si les recharges et le réceptacle lui-même ont une capacité de 12 petits bonbons ? Douze, cela ne vous évoque t’il rien ?

Les douze apôtres évidemment, et je ne crois nullement qu’il s’agisse là d’une simple coïncidence.

Poussons plus loin l’hypothèse, et imaginons un instant qu’autour de Jésus de Nazareth, à la table des apôtres, l’un d’eux est sorti son briquet Pez.

Thomas, Matthieu, voir Judas ou Jésus lui-même ?



Mais j’ai conscience que mes théories bouleversent l’ordre établi et dérangent. Le manque de temps et d’espace me font cruellement défaut pour vous détailler le rapport évident qui réside entre la muraille de Chine, Youri Gagarine, et les briquets Pez.

En vous remerciant, bonsoir.

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